Paracha Vayikra : comment éviter de se sacrifier ?

Ouvrons le sefer Vayikra, le Lévitique, troisième des cinq livres de la Torah.

Ce livre doit son nom à Lévi, fils de Jacob, fondateur de l’une des douze Tribus d’Israël dont les descendants, les Lévites, avaient la charge du service du Temple. Les prêtres, les Cohanim, étaient tous issus de la Tribu de Lévi et les premiers d’entre eux furent Aaron et ses fils.

Le Lévitique est composé de 27 chapitres qui relatent l’exposé des lois et des rites formulé par l’Éternel. La première paracha, la paracha Vayikra, nous présente les prescriptions de l’offrande et du sacrifice.

Comment éviter de se sacrifier ? Dévoilons cette expression énigmatique en nous concentrant sur ce passage du Lévitique.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Vayikra du sefer Vayikra (Lévitique) 1:1 à 5:26 et le sens des korbanot

Vayikra (וַיִּקְרָא) signifie : « et il appela ».

Abordons les deux premiers versets de la paracha.

Vayikra 1:1 à 1:2. Et l‘Éternel appela Moïse depuis la tente de réunion et lui parla en ces termes:…« Parle aux enfants d’Israël et dis-leur… »

Dieu interpelle Moïse afin de lui signifier un événement majeur dans la vie du peuple juif : le cadre de la pratique du Judaïsme est mis en place et des règles importantes sont instituées.

Nous pourrions commencer simplement par détailler ces règles, cependant l’appel que nous venons de citer est emblématique des rapports entre Dieu et Moïse.

Selon Rachi, avant même qu’il y ait la parole il faut qu’il y ait l’appel; et cet appel est un signe d’amour. Il marque la bienveillance que Dieu témoigne à Moïse. Moïse est capable de comprendre la parole de Dieu. Le langage entre Dieu et Moïse est un langage de relation intime, un langage d’amour.

De la part de Rachi, il s’agit également d’une allusion à ce qui se passe entre les anges, à ce qui est relaté dans la Kédoucha (קְדֻשָּׁה), cette partie de la Amida nécessitant le minian, soit un minimum de dix personnes priant ensemble. Dans la Kédoucha nous nous tournons les uns vers les autres et de cette manière nous nous interpellons d’un même langage. L’autre peut alors nous amener à envisager le changement dans notre vie.

En hébreu le même mot traduit « lecture » et « appel ». C’est ainsi que lorsque nous lisons le Chéma Israël, nous appelons le Chéma Israël. Quand nous lisons la Torah, nous appelons la Torah et nous sommes interpellés par ce texte.

Maïmonide fait le lien entre le langage de l’appel et celui de l’enseignement dans « Le Guide des égarés », en particulier de l’enseignement des offrandes (korbanot) et des sacrifices. À noter que l’ensemble de cet enseignement se trouve dans le Lévitique.

Vayikra 1:3. « Si son offrande (korban) est un holocauste pris dans le gros bétail, se sera un mâle en parfait état. Il le présentera de son plein gré devant l’Éternel, au seuil de la tente de réunion. »

Korban/קרבן, au pluriel korbanot/קרבנות, a pour racine karov/קרב qui veut dire « approcher, apporter ». Korban, improprement traduit par « sacrifice », signifie « offrande rituelle ».

L’Éternel exigeait que les enfants d’Israël se rapprochent des Cohanim à travers les korbanot.

À l’époque du Temple, il existait divers types de korbanot. Il s’agissait le plus souvent d’animaux de petit ou de gros bétail qui étaient abattus rituellement, cuits au feu et consommés par les personnes qui les avaient apportés, à l’exception des parts qui revenaient de droit aux Cohanim et de ce qui était interdit à la consommation (sang, graisse…). À défaut de bovin, de mouton ou de chèvre, il était possible d’apporter au Temple des tourterelles, des pigeons, du pain non levé ou les prémices de la récolte.

Maïmonide nous dit aussi que les enfants d’Israël ont besoin d’exprimer leur relation à Dieu à l’aide d’éléments concrets et matériels. Sinon, ils risquent de se tourner vers l’idolâtrie, comme cela a été le cas lors de la faute du veau d’or. Il a donc été nécessaire de matérialiser le culte au moyen du Sanctuaire et des korbanot.

Revenons au terme « sacrifice ». Comme nous l’avons dit « korbanot » ne veut pas dire « sacrifice ». Sacrifier signifie étymologiquement « rendre sacré », mais souvent ce mot renvoi à un type de dévouement qui implique l’oubli de soi, l’abandon de ses propres besoins. En ce sens, se sacrifier, c’est s’éloigner. Quand nous nous sacrifions pour l’autre, des attentes non exprimées perturbent nos relations avec l’autre et nous éloignent de lui.

Korban signifie le contraire puisque sa racine karov/קרב se traduit par « approcher ». Une offrande, un korban, nous permet de nous rapprocher de nous-même, et peut-être de nous rapprocher de Dieu.

En fait, Maïmonide nous dit que Dieu s’adresse aux êtres humains dans leur langage, en tenant compte de l’époque de leur existence; et l’époque des korbanot, au sens d’offrandes, est maintenant dépassée.

Moïse Nahmanide, rabbin du XIIIᵉ siècle, pense autrement. Pousser les gens à apporter des offrandes dans un sanctuaire pour se racheter n’est pas la bonne méthode. Il vaut mieux qu’un maître du culte aide ces personnes, au cas par cas, à mesurer l’étendue de leurs fautes et à les dépasser.

Alors, comment éviter de nous sacrifier et d’espérer vainement la récompense de notre sacrifice? 

Éviter de nous sacrifier c’est voir le korban autrement qu’une offrande, l’appréhender sous la forme d’un rapprochement. Cette manière de traiter la question est celle qui a cours aujourd’hui. La démarche de rapprochement est soit individuelle, soit collective.

La démarche individuelle :

Le korban est l’acte de nous rapprocher du Rabbin, qui a succédé au Cohen, pour lui exprimer nos difficultés et lui demander de nous aider à les traiter de façon positive et constructive. Si les difficultés sont des fautes, ce rapprochement devient l’équivalent d’un korban de réparation.

La démarche collective :

C’est une démarche de rapprochement dans le lieu de culte, une démarche de prière, de réflexion et de recueillement collectifs. Avec le Rabbin nous abordons l’Avodat Halev, la prière du cœur. Nous récitons la Kédoucha en nous interpellant les uns les autres, d’un même langage, en essayant de saisir au vol un quelconque message précieux.

La récompense du rapprochement, c’est le bonheur immédiat qu’il apporte aux deux parties, et c’est à cette récompense que nous souhaitons accéder dans notre investissement communautaire, amical et familial.

Paracha Tétsavé : l’habit fait-il le moine ?

Le Tabernacle des hébreux est édifié dans le désert du Sinaï. Le culte religieux juif, dicté par l’Éternel à Moïse, prend naissance.

Aaron אַהֲרֹן)), frère de Moïse de la Tribu de Lévi, devient le premier Grand Prêtre, le premier « Cohen Gadol », du Judaïsme.

Chémot 28:1. « Quant à toi, fais venir à toi Aaron ton frère, avec ses fils, du milieu des enfants d’Israël, pour exercer la fonction de prêtre en mon honneur: Aaron, avec Nadab, Abihou, Éléazar et Ithamar, ses fils. »

Aaron, le Grand Prêtre, officiera assisté par ses fils. Comment devront-ils pratiquer et quels habits sacerdotaux revêtiront-ils ?

Réfléchissons à l’importance de leur tenue vestimentaire dans le cadre de leur mission.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La paracha Tétsavé du sefer Chémot (Éxode) 27:20 à 30:10 et l’importance de l’apparence

En matière de communication, la forme a beaucoup plus d’incidence que le fond (95% contre 5%), selon certains spécialistes. La façon de s’exprimer fait partie de la forme, de même que la façon de se montrer, et en particulier de se vêtir. On pourrait s’inquiéter de cette grande part liée à la « forme », mais il est sans doute préférable de simplement en prendre acte pour mieux comprendre le sens du monde qui nous entoure.

La paracha Tétsavé nous décrit en détail l’habit que les Grands Prêtres et prêtres d’Israël, les Cohanim issus de la Tribu de Lévi, devaient porter.

Chémot 28:2. « Et tu feras confectionner pour Aaron, ton frère, des vêtements sacrés, insignes de gloire et de majesté. »

Suffit-il de porter une tenue exprimant la dignité, la gloire et la majesté pour être un bon Cohen ? L’habit fait-il le moine ?

Cette expression peut prêter à sourire, car dans la tradition juive, le moine (le nazir), qui fait vœu de privation pour atteindre la pureté, n’est pas un personnage particulièrement vanté. En fait, nous parlons ici des prêtres (les Cohanim) et non des moines. Les prêtres ont à servir Dieu avec dignité et majesté. Leurs tâches sont du domaine de la célébration, de la pratique de l’offrande, de l’éducation du peuple. Ils sont au service du Temple quel qu’en soit la forme. Les Cohanim sont l’incarnation du lien entre le peuple et Dieu.

Les lettres du nom « Cohen » peuvent former les termes « ken », signifiant « oui » et « he », évoquant la permanence de Dieu dans le temps.

Parlons maintenant de l’habit du Grand Prêtre en nous référant au texte de la paracha.

Chémot 28:4 à 28:39. « Voici les vêtements qu’ils feront: un pectoral, un éphod, une robe, une tunique à mailles, une tiare et une écharpe…Ils feront l’éphod d’or, de fil bleu, de laine teinte en pourpre et écarlate et de lin…Et deux épaulières d’attache…Tu prendras deux pierres de choham sur lesquelles tu graveras les noms des fils d’Israël…six noms sur une pierre et six autres noms sur l’autre pierre, selon leur ordre de naissance…Tu adapteras ces deux pierres aux épaulières de l’éphod…Tu feras le pectoral du jugement…que tu composeras à la façon de l’éphod…Tu le garniras de pierres précieuses..Ces pierres porteront les noms des douze fils d’Israël…Et Aaron portera ainsi sur son cœur, lorsqu’il entrera dans le sanctuaire, les noms des tribus d’Israël…Tu ajouteras les ourim et les toummim…Aaron portera ainsi le destin des enfants d’Israël sur sa poitrine, devant l’Éternel…Tu feras la robe de l’éphod, uniquement de fil bleu…Tu adapteras au bord de la robe des grenades d’azur, de pourpre et d’écarlate et des clochettes d’or entremêlées…Aaron la portera lorsqu’il officiera, pour que le son s’entende quand il entrera dans le Sanctuaire, devant l’Éternel, et quand il en sortira…Tu feras une plaque d’or pur, sur laquelle tu graveras, comme sur un sceau: « Consacré a l’Éternel »…Tu la fixeras sur le devant de la tiare…Elle sera sur le front d’Aaron qui se chargera ainsi des péchés…des enfants d’Israël…Tu feras la tunique à mailles en lin, ainsi que la tiare, et l’écharpe tu l’exécuteras en broderie. »

Apportons quelques précisions. L’éphod est un tablier richement brodé. Les ourim et les toummim sont des objets cultuels ayant trait à la révélation prophétique de la vérité.

Les épaulières et le pectoral sur lesquels les noms des 12 tribus sont gravés,  nous montrent que le Grand Prêtre porte le poids de l’unité du peuple d’Israël directement sur sa personne. Cela nous fait penser à la tunique bariolée que portait Joseph, le  fils de Jacob, qui symbolisait, elle aussi, l’unité des douze fils d’Israël.

Le fronteau, fait d’une plaque d’or sur laquelle est gravé « Consacré à l’Éternel », est destiné à rappeler au Grand Prêtre, en permanence, la dimension de sa charge et de sa responsabilité.

Qu’en est-il de l’habit des simples prêtres ? À nouveau référons-nous à la paracha Tétsavé.

Chémot 28:40 à 28:42. « Et pour les fils d’Aaron également tu feras des tuniques et aussi des écharpes, puis tu leur feras des coiffures, signes d’honneur et de dignité…Fais-leur aussi des caleçons de lin pour couvrir la nudité de la chair, depuis les reins jusqu’aux cuisses. »

Leur tenue vestimentaire est quand même plus simple que celle du Grand Prêtre.

Interprétons et actualisons ce que nous venons d’apprendre :

Suffit-il de bien habiller les Cohanim pour qu’ils soient à la hauteur de leur mission et de leurs responsabilités ? Ce n’est bien-sûr pas suffisant. Les Cohanim doivent être parfaitement conscients de la difficulté de leur mission et de leur responsabilité envers ceux qui leur font totalement confiance et qui les considèrent comme le lien avec l’Éternel.

Cependant, de façon générale, l’apparence d’un personnage chargé d’importantes responsabilités est absolument à prendre en considération; l’apparence étant l’habit, l’attitude et le comportement dans l’exercice de la fonction.

L’apparence influe sur le personnage lui-même, au niveau de sa personnalité, de son sens des valeurs, de sa conscience et, en conséquence, au niveau de ses actes. Sans parler du pouvoir de l’apparence sur ceux auxquels le personnage s’adresse. Depuis longtemps les militaires, le clergé catholique, les légistes, les commerciaux soutiennent cette thèse.

L’habit des Cohanim ne suffit donc pas à faire d’excellents Cohanim, mais il est l’un de leurs facteurs de réussite.

Revenons au thème précis de la paracha. Le fronteau en or est à mettre en relation avec les téfilines que nous portons aujourd’hui. Question à se poser : le talit a-t-il une correspondance précise avec un des vêtements du Grand Prêtre ? Peut-être. Ce qui est sûr, c’est que les franges (tsitsit)  du talit symbolisent l’ensemble des commandements de la Torah.

Au tout début de la paracha, il est demandé d’entretenir en permanence la flamme d’un luminaire dans le Sanctuaire. Il est fait de même, actuellement, dans les Synagogues.

Chémot 27:20 à 27:21. « Quant à toi, tu ordonneras aux enfants d’Israël qu’ils te procurent une huile pure d’olives concassées, pour le luminaire, afin d’alimenter les lampes en permanence…C’est dans la Tente de réunion, en dehors du rideau qui abrite le Témoignage [les Tables de la Loi], qu’Aaron et ses fils le disposeront, pour brûler du soir au matin… »

L’habit des prêtres Juifs d’autrefois était destiné à symboliser à la fois leur identité et la dignité, le sacré, la solennité, la bienveillance. Les Rabbins d’aujourd’hui s’appliquent, avec beaucoup moins de faste, à en faire tout autant en prenant en considération leur apparence, donc leur façon de se vêtir. L’habit ne fait pas le moine mais fait quand même, un tout petit peu, le Rabbin.

Paracha Choftim : où trouver la justice ?

Quelle vision objective avons-nous de la justice, en particulier de celle qui a prise sur notre quotidien, la justice sociale ? Difficile de répondre simplement. Cependant, nous sommes très sensibles à ce que nous appelons l’injustice.

Alors que nous entrons aujourd’hui dans le mois de Eloul, nous nous préparons pour Roch Hachana, qui sera le 1e tichri, dans exactement 1 mois. Roch hachana est justement appelé Yom hadin, jour du jugement et pose également la question de la justice.

Pourquoi ressentons-nous un tel besoin de justice ? Comment définir une justice absolue ? Que penser de la justice rendue ? Où trouver une justice qui nous sécurise par la confiance que nous avons en elle ?

La paracha Choftim nous montre Moïse appréhendant le principe de justice, avant l’entrée des enfants d’Israël en terre de Canaan.

Pour approfondir ce thème, une petite vidéo et un article qui la commente, sur la paracha de la semaine !

La justice dans la Torah avec la paracha Choftim du sefer Devarim ( Deutéronome 16:18 à 21:9)

« Choftim » signifie « les juges ». « Choftim » a la même racine que « michpat » qui veut dire à la fois « un jugement » et « une phrase ».

La paracha commence par les versets suivants :

Devarim 16:18 à 16:20. « Tu institueras des juges et des magistrats dans toutes les villes que l’Éternel, ton Dieu, te donnera, selon chacune de tes tribus; et ils devront juger le peuple selon la justice. Ne fais pas fléchir le droit, n’aie pas égard à la personne, et n’accepte jamais de présent corrupteur, car la corruption aveugle les yeux des sages et fausse la parole des justes. C’est la justice, la justice seule que tu dois rechercher… »

Inspiré par Dieu, Moïse s’adresse au peuple d’Israël. Il lui demande d’instaurer, sitôt arrivé en terre de Canaan, un système judiciaire fiable. Il présente cela comme une nécessité fondamentale. La justice devra être impartiale et inflexible. Le risque de la corruption, qui est toujours présent, est abordé pour y trouver remède.

Pourquoi ce désir d’organisation d’une justice future, alors que le plus important, la conquête de la terre de Canaan, n’a pas encore été réalisé ? Ceci peut nous surprendre. Pour répondre, pensons à l’alliance du peuple d’Israël avec Dieu. Nous sommes, dans notre paracha, dans la continuité des commandements de l’Éternel.

Autre question à se poser : que représente ce besoin de justice sur le plan moral et philosophique ? N’est-il pas ce besoin humain d’harmonie dans un peuple, tel que le souhaitait Jean-Jacques Rousseau avec le « Contrat Social »? Allons plus loin : la paracha parle de juges et de magistrats. Elle nous fait déjà passer de la justice divine à la justice rendue.

Rendre la justice est à la charge des juges, des prêtres et des Lévites qui doivent travailler de façon collaborative :

Devarim 17:8 à 17:10. « Si tu es impuissant à te prononcer sur un cas judiciaire…tu iras trouver les prêtres, les Lévites et le juge siégeant à cette époque. Tu les consulteras, et ils t’éclaireront sur le jugement à prononcer. Et tu agiras selon leur déclaration… »

La Torah crée un rempart contre l’injustice en prévoyant des villes refuge:

Devarim 19:2 à 19:5. « Tu réserveras trois villes…et cela pour que tout meurtrier s’y puisse réfugier. Or, voici dans quel cas le meurtrier en s’y réfugiant aura la vie sauve: s’il a frappé son prochain sans intention, n’ayant pas été son ennemi antérieurement… il pourra alors fuir dans une de ces villes et sauver sa vie. »

Les meurtriers involontaires et non coupables, aux yeux de l’Éternel, pourront trouver refuge sur certains territoires pour échapper à une vengeance injuste.

Justice absolue et justice rendue dans la bible hébraïque 

La justice absolue est la justice divine telle qu’elle nous est énoncée dans la Torah par les paroles de Dieu. Comme nous l’avons déjà indiqué, la justice est rendue en association par les juges, les prêtres et les Lévites.

La Torah fait la distinction entre justice absolue (divine) et justice rendue. Elle a institué la fonction de juge siégeant en son temps, plongé dans le cadre et les aléas du quotidien, tout en restant rattaché aux valeurs fondamentales de justice.

La tradition juive propose deux conceptions de la justice:  La justice absolue, le « din », et la justice bienveillante appelée « raHamim », devant conduire l’être humain à la paix. Les Pirkei Avot rejoignent cette distinction dans leur chap.1, en disant par la bouche de Rabbi Chimon Ben Gamliel : le monde repose sur 3 vertus, la vérité, la justice et la paix.

Une phrase des Psaumes (18:38), en ce sens, est à relever :  » Recherche la paix et poursuis-la ».

La Torah précise que les juges consultés sont « de leur époque ». Ils sont les intermédiaires entre le divin (justice absolue), et l’être humain dans la réalité de son temps (justice rendue).

Notre confiance en la justice d’hier et d’aujourd’hui

Sur ce thème, l’expression de la tradition juive se résume en 2 citations : d’après le Talmud Roch Hachana, il faut se confier à des juges d’aujourd’hui, même si leurs décisions diffèrent parfois de celles du passé. Il faut se refuser de penser que les juges d’antan étaient meilleurs que ceux du temps présent. Et selon Rachi : « il n’y a que le juge qui est dans son temps. »

Le juge du temps n’est pas toujours fiable, mais il est de toute façon le seul à pouvoir traiter des cas de façon efficace. Il nous appartient donc de mettre tout en œuvre pour avoir de bons juges et un bon système judiciaire.

Où trouver une vraie justice, une justice en laquelle nous ayons totalement confiance ? La question se pose dans tous les pays du monde et à toutes les époques. Dans l’exercice de la démocratie, par notre vote et par l’expression de nos opinions, nous devons soutenir le renforcement permanent de la compétence et de l’indépendance des juges.

De même, la construction du judaïsme d’aujourd’hui et de demain exige que nous nous adressions aux rabbins de notre temps, en faisant de notre mieux pour renforcer leur compétence et leur indépendance.

En vous souhaitant de belles réflexions ainsi que « Hodech tov », un bon mois de Eloul.

Paracha Nasso : Bénir ou être béni ?

Le don de la Torah se renouvelle chaque année. A partir de chavouot 2016, vous retrouverez sur notre site un petit commentaire actuel, une reinterprétation des vidéos « sur un pied ». N’hésitez pas à vous replonger dans le texte éternel de la Torah et de son commentaire sur le site sefarim, et à revoir les vidéos correspondantes sur notre chaine youtube…

Bonne étude!

La bénédiction est le sujet du chapitre 6, versets 22 à 27, du sefer Bamidbar (livre des Nombres de la Torah).

« Bénir ou être béni » nous amène à parler de la bénédiction. La signification, au sens strict, du mot « bénédiction » est « le fait de dire du bien »; ce qui met sur la voie de ses sens communs : louange ou appréciation favorable. De la formule « bénir ou être béni » transparaît une notion de relation affective importante que nous allons développer.

Bénédiction et Judaïsme :

« BraHa » est la version hébraïque de « bénédiction ». Ce terme a la même racine que « breHa » qui signifie « piscine » en hébreu moderne. Cette parenté de langage met « braHa » en relation avec une source d’eau inépuisable à laquelle nous pourrons toujours nous abreuver.

« BraHa » a également un lien de parenté avec le mot « bereH » qui veut dire « genou » ou « articulation ». La raison en est que le geste de plier le genou accompagne traditionnellement les prières et les louanges adressées à Dieu. La braHa joue également un rôle d’articulation dans nos vies. Elle nous permet de prendre conscience du présent, de ce que nous vivons dans l’instant, d’en profiter et de l’orienter pour que nous articulions nos vies dans le sens qui nous fait du bien.

La bénédiction se fait de Dieu aux Hommes. Elle se pratique aussi d’un Homme envers un autre Homme ou d’un Homme envers un groupe humain particulier. C’est ainsi qu’Abraham a été béni par Dieu et qu’ensuite Abraham a béni sa descendance pour lui transmettre la bénédiction reçue.

Une expression de bénédiction très courante est « barouH ata Adonaï… » (béni sois-tu Éternel…). Selon le Talmud nous sommes censés prononcer 100 bénédictions par jour, tout au long de la journée en termes de reconnaissance, remerciements, louanges et transmission des bénédictions reçues.

Nous ne devons pas bénir l’Éternel directement. Cependant une exception est citée dans le traité braHot du Talmud, concernant rabbi Ishmaël Ben Elisha qui a été confronté à une demande de Dieu. Dieu a demandé la bénédiction à Ishmaël Ben Elisha qui, très surpris, a répondu à Dieu : « Que ce soit ta volonté que ta bienveillance l’emporte sur ta rigueur, en particulier en faveur de ton peuple des enfants d’Israël ! » (L’Éternel aurait hoché la tête en signe d’approbation.)

Et dans notre vie courante ?

Nous prononçons des braHot en signe de satisfaction (bonne odeur d’un fruit, beauté d’un paysage…), en pratiquant certains actes, ou bien pour louer l’Éternel de nous avoir choisis pour remplir une mission et des devoirs. Bénédictions simplement de bonheur : « Tu es béni Eternel, qui est bon et parfaitement bon ».

Nous prononçons aussi des braHot aux moments cruciaux de notre existence pour marquer les inflexions positives ou négatives de notre parcours de vie. Bénédiction des moments difficiles : « Tu es béni, juge de vérité ».

Parmi ces bénédictions, l’une d’elles est très émouvante : celle accordée à nos enfants le vendredi soir. Elle est en liaison directe avec la paracha Nasso et sa formulation est identique. Au chapitre 6 de Bamidbar les prêtres bénissent les enfants d’Israël en ces termes :  » Que l’Eternel te bénisse et te protège, que l’Eternel tourne sa face vers toi et t’illumine de sa splendeur, que l’Eternel t’apporte la paix ».

Les bénédictions que nous donnons ou que nous recevons nous procurent de l’apaisement et de l’encouragement. Avec elles nous profitons mieux des bons moments et vivons mieux les moments difficiles de la vie, nous transmettons le meilleur de nous-mêmes à nos proches, nous renforçons notre confiance en Dieu et les hommes… Pouvons-nous nous en passer ?